Source : l’Equipe
En pleine coupe du monde féminine, le débat sur l’intégration ou non d’un préparateur mental dans l’équipe reste malheureusement toujours d’actualité…
Certes les changements ne s’opèrent pas du jour au lendemain mais là, cela fait bien longtemps que la question se pose et aujourd’hui il y a urgence car nous sommes encore une fois bien en retard sur cet aspect-là quand on regarde le fonctionnement des autres nations qui performent (notamment les USA).
Interview du principal intéressé Richard Ouvrard qui a eu du mal à trouver sa place à côté de Corinne Diacre au point de vouloir partir. Mais il a conquis la confiance des joueuses et se sent investi d’une mission.
UNE CERTAINE OUVERTURE
Tout portait à croire que l’intégration de Richard Ouvrard allait se faire naturellement, en pleine confiance avec un staff ouvert :
« Moi, j’ai mes compétences, mais je connais aussi mes limites et j’ai envie de dire : à chacun son métier. » « Il aide les joueuses à formaliser… pas leurs doutes, mais à formaliser des choses au sein du groupe pour qu’il vive le mieux possible, avait-elle ajouté. La principale raison de sa présence, c’est que le groupe vive mieux sur le terrain, car l’essentiel, c’est ça. » s’exprimait Corine Diacre à la veille de ce mondial
De plus, les joueuses, »ultra demandeuses », confirmaient bien l’utilité et la place à part entière d’un préparateur mental dans l’équipe.
Son approche à la fois pratique et sensible de l’équipe dans son ensemble, et des individualités complexes qui le composent, semble avoir rapidement séduit les joueuses de l’équipe de France. Adepte des séances d’interaction collective, il incite les joueuses à mieux se connaître mutuellement, à mettre leurs tripes et leurs pensées intimes sur la table, dans un milieu où, culturellement, on exprime peu ses états d’âme.
« On travaille avec lui depuis quelque temps maintenant, il nous aide à nous connaître, reconnaît Griedge Mbock. Nous et nos partenaires aussi. Le fait qu’il soit là, ça nous aide par rapport à tout ça. On voit qu’on est une équipe, les unes pour les autres, on est là pour s’entraider. Sans les autres, on n’est rien. On peut aller le voir et parfois il y a des rassemblements collectifs. C’est du travail sur nous-mêmes. Quand on est en groupe, ça apporte à l’équipe. » « C’est super important d’être en cohésion toutes ensemble, de penser les mêmes choses, d’avoir les mêmes objectifs, confirme Amandine Henry. Des fois, on sait qu’on a les mêmes objectifs, mais se le dire, c’est une autre chose.»
LE RÉEL PROBLÈME : UN CONTRÔLE EXCLUSIF DE L’ENTRAÎNEUR SUR SES JOUEUSES
Pour autant, si la mission en cours de cohésion et de « bien vivre ensemble » confiée à Richard Ouvrard semble en très bonne voie, à en juger par la solidarité et la complicité grandissantes entre les joueuses, elle ne s’est pas accomplie sans heurts et sans coups de freins. Selon nos informations, Ouvrard, agacé, perturbé par le manque de confiance, la rigidité de fonctionnement et la volonté de tout contrôler de Corinne Diacre, aurait été à deux doigts de quitter de son propre fait la sélection en début de Mondial. « Richard s’entend très bien avec les filles, nous confie un témoin. Mais avec Corinne Diacre, c’est plus difficile. Il n’a pas senti la confiance du staff et a souffert d’un manque d’intégration. Je pense qu’il est resté pour les joueuses, et parce que c’est un compétiteur et qu’il veut aller jusqu’au bout. »
Mais pour qu’un travail soit véritablement efficace, il faut que le sélectionneur fasse totalement confiance au coach mental et parfois ce n’est pas facile car il y a un sentiment de perdre le contrôle pour l’entraîneur.
S’il n’a pas confirmé notre information, Richard Ouvrard avoue être moins proche de la sélectionneuse (voir par ailleurs) qu’il l’est d’Olivier Krumbholz, le sélectionneur de l’équipe de France féminine de handball qui lui a fait, depuis le premier jour, une confiance aveugle. Mais, passionné par les relations humaines, il ajoute, philosophe, que « nous ne vivons pas dans un monde parfait… La relation ne va pas de soi mais elle se construit et se développe en permanence». Et, se qualifiant lui-même de « facilitateur », il est sans doute conscient de l’importance de son rôle, non seulement pour souder les filles entre elles et les rendre plus fortes et plus confiantes, mais peut-être aussi pour fluidifier la relation parfois tendue entre Corinne Diacre et son groupe.
« Il peut y avoir un décalage et un conflit de culture entre Diacre et ses joueuses, dont certaines, un peu rebelles, sont aujourd’hui plus éprises de liberté que les générations passées, poursuit notre témoin. Or pour créer les conditions de la réussite, Corinne veut tout contrôler et peut faire preuve d’une certaine rigidité. Cette confrontation entre deux cultures et deux lectures différentes peut créer un décalage… » Voire une fracture, que Richard Ouvrard, resté à bord du navire, peut aider à éviter. Et ce pour le plus grand plaisir de joueuses convaincues de son apport capital. « Richard est avec nous dans le groupe, il a une place très importante, confirme Maeva Clémaron. Ses exercices boostent le groupe et sont très bénéfiques. Sa présence parmi nous est positive. » Pour preuve, dans le huis clos de Clairefontaine, il se murmure déjà que Corinne Diacre « fait des efforts et chemine dans la bonne direction ».
LE TRAVAIL D’UN COACH MENTAL DANS UNE ÉQUIPE
Tout d’abord ce qui anime le préparateur mental sont les défis humains avant tout. S’adapter à un nouvel environnement, qui peut être plus ou moins règlementé et structuré ; s’adapter à différentes personnalités qui travaillent dans l’atteinte d’un même objectif, voilà le vrai challenge!
Les approches peuvent être sensiblement différentes cependant lorsqu’on travaille avec une équipe. On parle beaucoup d’intelligence émotionnelle et lorsqu’elle a lieu au sein d’un groupe on parle plus d’intelligence collective. Les deux sont liées et travaillent en synergie. L’idée est de « faire travailler les joueuses ensemble sur des processus d’émergence et de partage de l’information. Ça se fait parfois collectivement, parfois à travers des ateliers en sous-groupes. » Mais il y également des entretiens individuels. « J’ai écouté toutes les filles de l’équipe, certaines plus que d’autres. Elles viennent vers moi selon leur besoin, ou bien je les sollicite quand moi ou la sélectionneuse percevons quelque chose »
DIFFICULTÉ PRINCIPALE : LA COMPRÉHENSION DU MÉTIER DE COACH MENTAL
Richard Ouvrard, préparateur mental, évoque la difficulté pour l’encadrement des Bleues d’appréhender son travail tout en soulignant leur complémentarité. « Avec les filles, j’ai des interactions plus fréquentes, donc elles arrivent à démystifier et à comprendre mon travail, alors que c’est plus compliqué pour le staff d’appréhender ce que je fais. Ça fait partie de mon challenge dans cette compétition, car Corinne et moi nous connaissons peu, finalement, a contrario d’Olivier Krumbholz (sélectionneur de l’équipe de France féminine de handball), avec lequel je baroude depuis un peu avant les Jeux deRio(2016). »
Travailler l’aspect mental dans une équipe impliquerait également de travailler avec les entraîneurs en charge de l’équipe. C’est un travail bien plus complet mais nécessaire pour développer une bonne communication, une intégration des qualités de chacun ainsi qu’une détermination et un engagement total dans l’objectif à atteindre. Trouver sa place au sein du groupe, voilà le challenge que devra relever chaque préparateur mental lorsqu’il interviendra dans une équipe. La seule condition serait encore qu’on veuille bien qu’on lui en laisse une! Cela devra passer pas une clarification du métier de coach mental, son rôle, les différents champs possibles, ainsi que les apports concrets. Puis du côté des entraîneurs, cela demandera une plus grande ouverture, et aussi une autre façon de voir le management d’une équipe avec la mise de côté obligatoire de son égo : le joueur n’appartient à personne et notre objectif commun sera, par la quintessence des compétences de chaque corps de métier, d’amener l’athlète à son plein potentiel.
“Avec ses séances individuelles et collectives, (Richard Ouvrard) aide (les joueuses) à s’exprimer et à générer de l’empathie entre elles. (…) Quand les joueuses ont une meilleure connaissance de qui elles sont et une meilleure compréhension du fonctionnement de leurs partenaires, je peux vous dire que dans les grandes compétitions, on voyage plus facilement en eaux calmes.
Olivier Krumbholz, sélectionneur de l’équipe de france féminine de handball
« Après, dans un staff, ce serait un obstacle de croire que nous devrions être d’accord sur tout pour travailler ensemble. Je crois par contre, tant que faire se peut, à la mise au clair, à la communication et à une réciprocité dans l’engagement, dans nos compétences respectives. Chemin faisant, certaines choses se régulent. Moi, je suis avant tout là pour les filles. J’ai le sens du défi, l’envie d’aller au bout et la difficulté ne me fait pas peur. »
Ce qui est frappant dans ces propos c’est qu’on sent le préparateur mental assez isolé du staff. Pourtant, il réalise un travail de cohésion incroyable auprès des joueuses, qui reste pour lui sa priorité. Il a bien évidemment dû y mettre une priorité étant donné que le staff ne semble finalement pas si ouvert à l’intégration de la préparation mentale dans l’équipe dans son intégralité. En résumé, le staff se dit certainement : « ça peut être bien pour les filles, mais nous, on en n’a pas besoin…. » Or, chacun a besoin de s’améliorer, de donner le meilleur de lui-même, d’être là avant tout pour l’équipe et pas pour soi. Et ça, ça se cultive au quotidien. Le chemin reste encore long quand on voit les comportements de certains vis-à-vis de cet aspect.
FAUSSE CROYANCE SUR LE « MONSTRE » AMÉRICAIN
On entend beaucoup de personnes nommer l’équipe américaine comme un « monstre ». Heureusement que Richard démystifie tout cela : « Déjà, ce n’est pas un monstre ! »En effet, quelle probabilité de gagner si l’on met déjà l’autre équipe sur un piédestal? Il y a bien évidemment une équipe très forte en face, qui a des résultats incroyables mais dans un évènement comme la Coupe du Monde, il peut y avoir de très belles performances et c’est pour cela aussi qu’il est important de croire pleinement en ses chances : pour faire bouger les stats et détruire les croyances limitantes de ce style.
« On s’est mis depuis longtemps dans la tête, et sans pression majeure, qu’on allait les rencontrer en quarts de finale et je sais aujourd’hui que les joueuses n’ont pas peur des États-Unis. La clé mentale pour ce match, c’est qu’elles réussissent à rester dans le plaisir, sans surjouer, et sans vouloir faire autre chose que ce qu’elles savent faire. »
En effet, il est facile de tomber dans le fait d’en faire trop, de surjouer lors d’un tel évènement face à une équipe de cette qualité en face. Mais le plus important à ce moment-là est bien évidemment de s’appuyer sur la stratégie à mettre en place, sur les forces individuelles et collectives et que chacune soit concentrée sur ce qu’elle doit mettre en place pour que la magie opère 🙂
Sources : lequipe.fr
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